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dimanche 12 mai 2013

L’Algérie est en guerre quasi permanente de …1830 à nos jours ! | Mémoire


L’Algérie est en guerre quasi permanente de …1830 à nos jours !

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Par Le Matin | 09/05/2013 22:08:00 | 4739 lecture(s) | Réactions (16)
Aux guerres livrées aux armées coloniales dès le 27 juin 1830, à Alger d’abord, puis à l’Ouest avec l’Emir Abdelkader jusqu’en 1847, et à l’Est avec Hadj Ahmed Bey jusqu’en 1848, avaient succédé des insurrections populaires qui avaient jalonné de sang la deuxième moitié du 19ème siècle.
L'Algérien ne se fait plus d'illusion sur le personnel politique à la tête du pouvoir.L'Algérien ne se fait plus d'illusion sur le personnel politique à la tête du pouvoir.
La période des soulèvements populaires se prolonge avec l’insurrection de l’Aurès en 1916. Puis survient le temps des combats politiques avec la création des premiers partis politiques algériens dans les années 1920. Cette période d’accalmie ne dura pas longtemps, et les massacres sanglants de mai et juin 1945 renouèrent avec les insurrections populaires, tout en sonnant le glas du combat politique qui ne menait à rien.
Vint le 1er novembre 1954 et une guerre atroce qui couta très cher au peuple algérien, un million et demi de martyrs dont il faudra bien un jour en faire la liste pour ne plus laisser dans l’anonymat les chouhadas. La guerre était-elle terminée, une fois l’Indépendance acquise en juillet 1962? Loin s’en faut : une guerre pour le pouvoir entre algériens est enclenchée alors même que le peuple n’avait pas fini de célébrer l’Indépendance chèrement acquise. D’où les premières manifestations de l’Algérie indépendante aux cris de «Sebâa Sinin Barakat», sept ans ça suffit. Mais l’Algérie n’en a pas fini avec les violences qui vont marquer les 30 premières années après l’Indépendance :
- Eté 1963, manifestations à Constantine contre le chômage auxquels répond Ben Bella par des nationalisations de pâtisseries !
- 29 septembre 1963 : Hocine Aït Ahmed, le colonel Mohand Oulhadj et d'anciens officiers maquisards de la guerre de libération nationale de l'Algérois, de la Kabylie et du Constantinois créent le Front des Forces Socialistes (FFS) et décident d'une lutte armée contre la dictature de Ben Bella et de Boukharouba. (1)
- 19 juin 1965, manifestations à Annaba contre le coup d’Etat qui venait de se produire conduit par Boumediene, 40 morts.
- 14 décembre 1967 : Tentative de coup d'Etat du colonel Zbiri contre le colonel Boukharouba. De violents accrochages ont lieu à El Affroun. Des Migs pilotés par des soviétiques bombardent les colonnes blindées des putschistes. Près d'un millier de morts dont de très nombreux civils. (2)
- 1970-1971, grèves des étudiants qui seront réprimées par des arrestations de leaders étudiants, et la dissolution de l’UNEA. Etudiant à l’époque, je me souviens que des ordres avaient été donnés aux jeunesses du FLN d’agresser tous les étudiants isolés.
- Juin 1974 : Affrontements entre gendarmes et population à Larbaâ Nath Irathen, suite à l'interdiction de chanteurs kabyles de se produire sur scène: 3 morts. (3)
- 20 avril 1980 : Les brigades anti-émeutes donnent l'assaut en pleine nuit à l'université et à la cité universitaire de Tizi Ouzou : Plus de 500 blessés. Vingt-quatre responsables du collectif culturel berbère sont arrêtés. Certains seront sauvagement torturés. (4)
- 9 novembre 1986 : une manifestation de lycéens à Constantine est sauvagement réprimée par les brigades anti-émeutes : 4 morts, de nombreux blessés. Près de cinquante citoyens sont arrêtés, torturés et jugés. (5)
- Suite à ces évènements, six intellectuels de Constantine et Annaba sont enlevés par la sécurité militaire et assignés à résidence au Sahara (Bordj Omar Driss) pour «participation à mouvement insurrectionnel». (6)
- 5 - 10 octobre 1988 : Une machination criminelle orchestrée par un clan du pouvoir et un parti stalinien semi-clandestin (PAGS) débouche sur des émeutes d'une jeunesse désemparée sur tout le territoire national. L'armée tire sur la foule : plus de 600 morts. Des centaines de jeunes citoyens seront arrêtés et affreusement torturés dans certaines casernes et commissariats. (7)
- 10 janvier 1992 : Chadli démissionne sous la pression de l’armée afin de faire annuler le deuxième tour des élections législatives qui allait consacrer la victoire du Front Islamique du salut (FIS). Commence alors une nouvelle vraie guerre d’Algérie qui allait durer une dizaine d’années et entrainer la mort de 200.000 algériens, et la «disparition» - entendre exécutions sommaires- de 20.000 autres algériens.
- Avril-juillet 2001 : Révolte de la jeunesse dans plusieurs régions du pays : Bejaïa, Bouira, Tizi-Ouzou, Annaba, Oum El Bouaghi, Tébessa, Boumerdés, El Tarf, Skikda, Biskra : une centaine de morts et plus d'un millier de blessés. (8)
- 1992-2004 : Salah-Eddine Sidhoum, publie dans Algeria-Watch, une chronologie des évènements en Algérie, rédigée sur la base d’informations de la presse nationale et internationale, des agences de presse, des témoignages de citoyens et de faits vécus par l’auteur. Elle retrace jour après jour la tragique guerre imposée à la population par les putschistes du 11 janvier 1992 avec son lot de morts, de blessés, de souffrances et de destructions. (9)
La Révolution éclatée dans le temps et dans l’espace !
A partir de janvier 2005, c’est-à-dire dès les débuts du deuxième mandat de Bouteflika, l’Algérie entre dans une période de guerre larvée sous forme d’émeutes populaires qui vont toucher toutes les régions d’Algérie. Deux phénomènes caractérisent ces émeutes populaires : elles sont spontanées et locales sans liaisons entre elles. Une Révolution certes, mais éclatée dans le temps et dans l’espace. Chaque jour, des routes sont coupées, des pneus sont brûlés, des pierres sont lancées contre les forces de l’ordre, les édifices et biens publics sont saccagés. Les revendications ? Ni changement de régime, ni autre revendication politique. Mais, les Algériens - qui s’estiment laissés pour compte- réclament de manière brutale l’amélioration de leurs conditions déplorables de vie : des logements, des routes, de l’eau potable, de l’électricité, de meilleurs salaires, et du travail. Une fois de plus, on peut relever dans Algeria Watch (10) la liste des émeutes populaires de 2005 à 2011 :
  • Année 2005: 113 émeutes populaires
  • Année 2006: 49.
  • Année 2007: 71.
  • Année 2008: 131.
  • Année 2009: 105.
  • Année 2010: 52.
En janvier 2011, l’Algérie entre de plein pied dans les soulèvements populaires du «Printemps arabe». Janvier 2011 fut un mois d’enfer : 166 émeutes populaires en 26 jours, soit plus que les années 2009-2010 cumulées ! Dans une nouvelle prémonitoire, publiée dans le journal français «Le Monde» en décembre 2008, j’avais bien prédit des manifestations populaires spontanées en Algérie qui allaient s’étendre à tout le monde arabe (11). Et j’avais souligné que ces manifestations exprimaient le ras le bol des populations arabes, en renvoyant dos à dos aussi bien les pouvoirs en place que leurs oppositions. (12) Le pouvoir algérien ayant usé et abusé du bâton et de la carotte (gros chèques pour donner l’illusion de régler quelques problèmes), l’Algérie ne suivra pas le printemps arabe, et se résoudra à reprendre le train-train quotidien des soulèvements spontanés et ininterrompus avec moins d’intensité :
- 85 émeutes populaires de février 2011 à décembre 2011. - 68 émeutes en 2012.
- Une dizaine d’émeutes populaires depuis le début de l’année 2013.
Est-ce à dire que les revendications populaires sont à bout de souffle ? Loin s’en faut, même si le pouvoir croit que grâce à l’argent du pétrole et du gaz il peut acheter la paix sociale, et se maintenir en place pour l’éternité, préparant sa progéniture a la relève. (13) En réalité, ce qui se prépare c’est bel et bien deux prochaines guerres pour l’Algérie.
La première guerre sera politique : 
Tels "les petits ruisseaux qui font les grandes rivières", les émeutes populaires locales finiront par fusionner un jour ou l’autre pour se transformer en manifestation nationale appelant, voire exigeant, un changement radical de régime, vu que le pouvoir en place n’a pas la volonté de régler les problèmes de la population, se cantonnant dans le service de ses partisans, ses clients, ses protégés, ses serviteurs, et ceux qui peuvent lui être utiles pour le protéger, essentiellement les services de sécurité. La Révolution éclatée, dans le temps et dans l’espace, qui scandait des revendications d’ordre social, finira bien par se regrouper en une nouvelle révolution nationale qui brandira comme mot d’ordre la mise à mort d’un système politique prédateur qui avait confisqué les fruits de l’Indépendance.
Ce sera une guerre impitoyable, les intérêts matériels et financiers immédiats des uns et l’avenir des autres étant en jeu. Elle sera meurtrière : le pouvoir n’hésitera pas à user et abuser des forces de répression, et de requérir l’armée et ses gros moyens pour étouffer toute contestation, y compris l’aviation et les blindés. C’est bien dans cette perspective que de grosses augmentations de salaires avaient été servies à l’armée, la gendarmerie, la police. N’ont pas bénéficié de ces largesses d’autres services de sécurité, non armés ceux-là, donc inutiles pour la défense du périmètre des maitres du pays : les douaniers (14), et les pompiers (15).
Mais le pouvoir ne se contentera pas de mobiliser uniquement les services de sécurité pour frapper les manifestants, ce serait démontrer au grand jour, et surtout à l’opinion occidentale que la dictature sévit en Algérie. Il mobilisera aussi ses partisans civils pour prouver que les manifestants sont isolés au sein de la population. Qui sont ces partisans civils et serviles prêt à se lever pour servir les maîtres qui leur accordent des largesse sans compter ? Ils seront plus nombreux qu’on ne le croit. Il y aura bien sûr les partis du pouvoir, FLN, RND, et des groupuscules dont les noms changent au gré des circonstances. Et aussi la "famille révolutionnaire" avec les moudjahidines vrais ou faux, leurs enfants et petits-enfants, les enfants et petits enfant de Chouhadas ou de harkis. S’ajouteront toutes les organisations satellites qui mangent régulièrement au râtelier du pouvoir : UGTA (16), UNPA, UNJA, UNFA, et tutti quanti…
Le pouvoir puisera au besoin dans ses réserves en instance d’admission dans la famille révolutionnaire : 800.000 dossiers de reconnaissance de la qualité de moudjahid (en fait de faux moudjahidine ou de vrais harkis) sont en instance au sein de l’organisation des moudjahidine (17). Voilà une force d’appoint redoutable dont se servira le pouvoir comme chair à canon: ces 800.000 "moudjahidine" potentiels risquent fort d’être armés pour défendre chèrement des privilèges qu’ils n’ont pas encore acquis, et qu’un renversement de régime risque de les en priver. Il faut se rappeler la méthode utilisée par l’armée américaine pour recruter des volontaires pour combattre en Irak parmi les sans-papiers qui vivent dans l’illégalité en Amérique : "Tu veux acquérir la citoyenneté américaine ? Va combattre en Irak, et si tu en reviens vivant, tu l’auras !".
De quelle idéologie se réclament tous ces défenseurs du pouvoir mafieux qui règne en Algérie ? Aucune. Ils se réfèrent tous –explicitement ou implicitement- aux avantages et privilèges que leur sert, ou leur servira le régime. Le lundi 6 mai 2013, on peut lire dans la presse que : "les députés avec l’aval de leur président auraient voté pour eux-mêmes une augmentation sous forme de primes de dix millions de centimes par mois …". (18)
Comme la presse a publié des articles sur l’accès aux meilleurs soins à l’étranger pour la Nomenklatura, et les hôpitaux-mouroirs pour l’ensemble de la population ! (19) Mais, le pouvoir peut mobiliser encore d’autres ressources parmi la population civile affamée depuis des décennies : moyennant promesses de logements, de travail, voire de commerces, le pouvoir n’hésitera pas à inciter les Algériens à s’affronter les uns aux autres. Des baltagias (20) algériens restent disponibles, suffit de les siffler ! En face du pouvoir et ses alliés, plutôt ses serviteurs zélés, vont s’aligner les masses populaires avec au premier rang les jeunes qui n’ont rien à perdre sinon leur vie qu’ils risquent chaque jour dans les flots de la méditerranée.
Abdelkrim Badjadja (1re partie)

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