Les silences troublants de Bouteflika
Mots clés :
Bouteflika,
Pouvoir,
Président,
Constitution,
Présidentielle,
Maladie
Depuis
2011, le président Bouteflika est reclus dans son palais d’El Mouradia.
Les agendas de la révision de la constitution et la présidentielle, deux
moments censés être fondamentaux pour le pays, sont toujours inconnus.
Le
constat interpelle, il est même troublant. Abdelaziz Bouteflika ne
voyage que très rarement. L’avion présidentiel occupe désormais le
tarmac de l’aéroport Houari Boumediene. Aux nombreux sommets
internationaux, le président délègue le premier ministre, le ministre
des Affaires étrangères, voire le ministre délégué aux affaires
maghrébines. Au Sommet de la Ligue arabe qui aura lieu à Doha, le 24
mars, c’est Sellal qui le représentera.
Mais
pas seulement, il alterne des périodes de longues absences et une
présence quasi-permanente au JT de 20 Heures de l’ENTV. Le rythme est
désormais une quasi-habitude ces dernières années. Froid et surtout
calculateur en diable, Bouteflika est imperméable aux critiques. Encore
moins à une autocritique. Même si tous
les leviers du pouvoir demeurent entre ses mains, il est pour autant
devenu inaudible. Le président ne parle plus beaucoup effectivement,
contrairement à son premier mandat où il discourait sur tout, voyageait
partout. Même la traditionnelle ouverture de année judiciaire n’a pas eu
la visite ni le discours du président cette année.
Sous
le poids de l’âge et une maladie dont on ignore tout, Bouteflika n’est
plus loquace. Quand il reçoit présidents ou ministres étrangers, on ne
l’entend pas. L’ENTV se contente de quelques images et poignées de mains
commentées. L’épisode de la visite de François Hollande en décembre
dernier est encore dans les mémoires. Trois jours durant, alors que le
président français avait occupé presse écrite, radios et télévisions,
multipliant les déclarations, les petites phrases, Abdelaziz Bouteflika
ne décroche pas un mot. Pendant la prise d’otages de Tiguentourine, en
janvier dernier, le président ne fit aucune déclaration. Comble du
cynisme, il avait préféré envoyer un message de soutien à l’équipe
nationale de football qui participait à la coupe d’Afrique que de se
prononcer sur ce qui se passait à In Amenas. Il a fallu attendre presque
un mois pour qu’il daigne rendre hommage à l’ANP pour son intervention
dans cette tragique attaque de la base gazière. Même topo pour la
cascade de révélations de corruption qui a éclaboussé Sonatrach et
quelques-uns de ses proches ministres. C’était par le biais d’une lettre
à Sidi Saïd, patron de l’UGTA, rendue publique, que le président a
exprimé sa réprobation. Sans suite cependant.
Il
faut rappeler que depuis sa mystérieuse maladie dont la presse a fait
écho à mi-voix en 2005, le président fait le service minimum. Se
réservant aux moments les plus cruciaux, comme à la veille de la
dernière élection législative où il avait lancé quelques
déclarations-leurres pour inciter les Algériens à voter.
Depuis
son arrivée à la présidence, il s'est employé à neutraliser
l'opposition. Sans contre-pouvoir politique, il ne reste plus que le DRS
dont le patron a été le seul à n'avoir pas été dégommé par le
président. Autrement, Bouteflika a réussi à installer ses fidèles à tous
les étages du pouvoir.
L’homme
est madré, un animal politique à sang froid, il tient fermement à son
agenda. Mais il est clair néanmoins - les lois de la biologie obligent -
que le temps joue contre lui. Mais pas forcément contre son clan.
Actuellement, il garde tout le mystère sur la révision de la
Constitution. Un texte fondamental qui engage toute une nation rédigé
sans débat ni discussion par un précarré de fidèles du président. Une
consultation de partis et personnalités politiques eut bien lieu en
2011. Une synthèse des recommandations a également été remise par la
commission Bensalah. Depuis plus rien.
Là
comme ailleurs, la présidence entretient le flou. Les déclarations
contradictoires de Sellal et Daho Ould Kablia en disent beaucoup. Car ou
bien l’un des deux hommes (voire les deux ) ignore le degré d’avancée
de la nouvelle loi fondamentale ou alors leurs déclarations font partie
d’une stratégie réfléchie. A moins d’une année de la présidentielle,
beaucoup de questions restent sans réponse. La rue algérienne doute fort
que le clan au pouvoir daigne laisser quelque espoir d’une véritable
transition démocratique. Tout l’enjeu pour Bouteflika et sa clique est,
sauf surprise, de se maintenir aux commandes du pays.
Yacine K.
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